Le chiffre est sans appel : 1,4 à 3,7 milliards d’oiseaux sont chaque année tués par des chats aux États-Unis, selon une étude publiée en 2013 dans le magazine scientifique Nature. En France, aucune étude jusqu’à présent. C’est pourquoi le Museum d’histoire naturelle et la Société française pour l’étude et la protection des mammifères ont lancé en 2015 une vaste enquête participative qui doit durer trois ans (voir ci-dessous).
Toutefois, avec 13 millions de chats dans l’Hexagone, « on peut estimer qu’ils sont responsables de la mort de 75 millions d’oiseaux » explique Anne-Laure Dugué responsable du programme « oiseaux en détresse » à la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) qui a lancé une campagne de sensibilisation sur le sujet début novembre. Et le nombre de chats ne cessent de grimper. Bien plus que les chiens : en 2014, la population féline avait augmenté de plus de 11 % sur les deux dernières années, tandis que le nombre de chiens, lui, a diminué de 2 %.
Pas question pour autant de jeter l’opprobre sur le seul chat domestique : « La responsabilité est partagée avec les chats errants et les chats harets, ex-chats domestiques revenus à la vie sauvage, » nuance Anne-Laure Dugué. Moins nombreux, ces derniers doivent chasser pour se nourrir et tuent par conséquent plus d’oiseaux. Pas loin d’une cinquantaine par an contre cinq à dix pour le chat domestique. Peu importe, diront certains qui estiment que « c’est la loi de la nature ». Le raisonnement est un peu court, car le chat domestique ne fait pas partie de l’écosystème : il n’a pas de prédateurs naturels et il supprime plus d’oiseaux que ce que ferait une régulation naturelle. Notre brave matou domestique est certes un chasseur par instinct, mais il ne tue pas pour se nourrir. Il le fait le plus souvent pour jouer et faire plaisir à ses maîtres auxquels il rapporte parfois consciencieusement ses proies.
Sans culpabiliser les propriétaires de chats, de petites précautions permettent de limiter la prédation. À commencer par l’entretien de leurs griffes qui, coupées, perdent de leur efficacité. Mieux vaut garder son chat à l’intérieur au petit matin et à la tombée du jour. C’est le moment où les oiseaux sont les plus fragiles. Éviter également de laisser sortir votre animal après la pluie : les oiseaux sont alors des proies plus faciles. Il faut également stériliser son chat. Cela n’aura peut-être aucun effet pour empêcher votre chat de tuer des oiseaux, mais vous éviterez qu’il ne se reproduise avec d’autres chats errants ou domestiques, multipliant ainsi le nombre de prédateurs.
Des dispositifs peu coûteux
La LPO s’est intéressée par ailleurs à différents dispositifs qui vont limiter la prédation du chat envers les oiseaux. Le Catwatch (69 €) installé sur la zone à préserver émet ainsi des ultrasons, inaudibles pour l’homme, dés qu’un chat se présente dans un rayon de 12 mètres grâce à un détecteur de mouvement. La plupart des matous vont rapidement fuir la zone protégée. Quelques-uns, plus territoriaux, vont mettre jusqu’à trois mois avant de délaisser les lieux. Mais au fil du temps, le Catwatch est très efficace. « Nous avons fait un suivi pour d’autres espèces et seuls les rongeurs et les renards sont également sensibles au Catwatch » assure Anne-Laure Dugué.
Les clochettes ont elles aussi leur efficacité s’il y en a plusieurs sur le collier (2 € la clochette) : malins, certains chats parviennent parfois à éviter le tintement d’une clochette, mais jamais de deux. Plus efficace : la collerette en tissu aux motifs multicolores (10 €) que propose la société Birdsafe. Une étude scientifique de l’Université de Saint Lawrence, aux Etats-Unis, publiée en 2015 dans Global ecology and Conservation a montré que les chats dotés de ces collerettes tuaient 19 fois moins d’oiseaux au printemps que les chats qui n’en avaient pas. Certe votre chat ainsi équipé ne passera pas inaperçu, mais c’est pour la bonne cause ! Avec une idée proche, une autre société propose un « bavoir » coloré pour un prix équivalent qui semble toutefois plus gênant pour le chat. Bien sûr cette collerette se détache en cas de nécessité pour éviter tout étranglement de l’animal. Voilà pour rendre visible votre chat aux yeux des oiseaux.
Une autre parade consiste à protéger les oiseaux eux-mêmes en empêchant votre animal de grimper aux arbres ou sur le perchoir. Le Stopminou (37 €) est une série de pointes à poser autour du tronc et est absolument dissuasif. Aucun risque pour le chat qui ne s’aventurera pas au-delà de la barrière de protection.
Ce ne sont que quelques gestes simples et des dispositifs peu coûteux finalement, mais ils permettront ainsi une cohabitation plus harmonieuse des chats avec les oiseaux.